Entre la collection de magnets de départements Français incomplète, quelques polaroïds et l’imposant logo de la marque du frigo, se trouve une liste de courses. Bien qu’elle pourrait comporter l’essentiel pour remplir le garde-manger, elle sert surtout à nourrir les rêves de passionné. “Faire un trackday au Nürburgring” ; “Assister au GP de Monaco”, “Se rendre au Mans pour les 24h”… Et il se pourrait qu’une case soit cochée cette année. BMW M Motorsport nous ont invités à suivre la course à leur côté, pour le retour de la marque à l’hélice dans la plus mythique course d’endurance du monde. Pourvu qu’il y ait du spectacle, des rillettes et que la course soit excitante. Bienvenue dans la Sarthe…
Les 24 Heures du Mans ne sont pas qu’une simple course d’endurance, c’est une véritable célébration de la passion automobile. Au-delà de la compétition, c’est un festival où l’ambiance et les événements en marge de la course sont à vivre. Par les différents récits de nos amis s’y étant déjà rendu, nous n’avions qu’une hâte : arriver sur place et ne pas dormir pour profiter de l’expérience au maximum.
En se promenant dès le vendredi soir dans la ligne droite des stands, on se demande si on n’assiste pas plutôt au Tour de France. Des piétons, des adeptes de course à pied et des cyclistes se partagent la piste longue de 13.6 kilomètres. Certains essayent peut-être de battre le record de vitesse établi à 407 km/h par Roger Dorchy, à bord de sa WM P88 en 1988 ? Le Mans est réellement un événement à part. Quelle course offre aux spectateurs un accès à la piste ? Se laissant porter par la foule, nous arrivons rapidement sous l’arche du virage Dunlop. Là, est exposé le Trophée du vainqueur de la course. Pour rigoler, nous collons un sticker Machinistic sur un vibreur : va-t-il résister ?
Alors que nous descendons vers la Pitlane, nous avons une vue plongeante sur les tribunes, qui demain seront pleines, comme à chaque édition depuis 1923. Le Mans fait partie des courses les plus mythiques, tout comme le GP de Monaco et les 500 Miles d’Indianapolis. D’ailleurs, même si de nombreux pilotes essayent de monter sur la plus haute marche de tous ces podiums, seul Graham Hill est détenteur de la Triple Couronne. Si comme nous, vous avez déjà lu Michel Vaillant, il est certain que la course vers ces trois victoires fera écho au premier album de la série, Le Grand Défi.
Alors que ça se bouscule dans la pitlane, pour admirer les voitures au plus près, nous décidons de prendre la tangente et de revenir au plus tôt Samedi matin pour profiter d’une zone libre.
Samedi matin. Ça caille. Rapidement nous enfilons des vêtements chauds et mettons le cap vers le circuit. Sur la route, nous surprenons des discussions à propos de la météo. Il va sûrement beaucoup pleuvoir, ce qui devrait rythmer la course. Nous arrivons rapidement dans la pitlane. L’ambiance est particulière. Dans chaque stand, les mécaniciens travaillent sur les voitures, affinant les derniers réglages en fonction du déluge qui s’apprête à nous tomber dessus. De grosses enceintes balancent de la musique, à chaque écurie son style : du Phil Collins chez Aston Martin, de la techno chez Ferrari… Nous avons l’impression d’assister à un énorme blind test.
Dans les stands, nous observons des voitures aux styles bien différents. Il est possible de s’engager dans trois catégories différentes pour les 24h du Mans. Certaines voitures, qui ressemblent extérieurement à des modèles de série, sont les LMGT3. On y retrouve des Aston Martin, Ford Mustang, Porsche 911 R, Ferrari SF90 ou encore les M4 GT3. Entre cette catégorie et la catégorie reine, se trouvent les LMP2 : des prototypes au châssis Oreca et dotés de puissant moteur V8 Gibson. Ces voitures aux allures reliques font plaisir à voir, bien plus analogiques que les Hypercar. Comme leur nom l’indique, la crème de la crème des voitures engagées sont des monstres de vitesse : moteur hybride, aérodynamique de pointe, châssis pointu…
Les machines engagées par des constructeurs et sont de véritables laboratoires roulants. Le circuit de la Sarthe est un vrai terrain d’innovation qui a vu naître des technologies aujourd’hui répandues : freins à disque, jante, aérodynamisme, pneu à carcasse radial, phare Led et laser… La course automobile n’est pas qu’une manière de brûler de l’essence, c’est une des clefs pour que l’automobile s’inscrive dans un futur plus propre.
Arrivés en bout de la pitlane, nous nous retrouvons sous la tour Michelin. A ses pieds, les stands de BMW M et de la Team WRT. La course est si complexe, les voitures demandent une organisation et un savoir-faire si particulier, que les constructeurs n’ont souvent pas d’autres choix que de confier les clefs de leurs autos à des écuries privées pour les exploiter convenablement. Après une victoire en 1999, avec la BMW V12 LMR, et après vingt années à déserter la catégorie reine, BMW est enfin de retour. De quoi ravir les fans de la marque.
La team a engagé quatre voitures : deux en catégorie Hypercar, et deux autres en LMGT3. C’est d’ailleurs La team a engagé quatre voitures : deux en catégorie Hypercar, et deux autres en LMGT3. C’est d’ailleurs un réel plaisir que de retrouver un castor rapide, avec des décorations de course. Petite préférence pour la #31, avec une décoration qui nous évoque la M1 Procar BASF et surtout les 3.0 CSL Grp.2 UFO. C’est marrant comme une décoration peut changer l’aspect d’une voiture. La voiture #46 n’adopte pas son numéro par hasard, puisque Valentino Rossi sera à son bord ; nous sommes admiratifs car ce pilote est tout autant performant au guidon que derrière un volant.
Impressionnantes, les BMW M Hybrid V8 sont de sacrées machines. Engagées depuis 2023 sur des courses outre-Atlantique, les voitures sont assez performantes pour prétendre à la victoire. Dotées d’un châssis Dallara, identique aux Cadillac engagées dans la même catégorie, elles sont équipées d’un V8 4.0 de 640 ch, couplé à un moteur électrique pour un total de 868ch… Si la puissance est importante, nous toussons quand on apprend que le poids est contenu à 1030kg. Quelles fusées !
L’heure tourne, le départ est donné à 16h. Nous nous dirigeons vers la grille de départ, là où sont garées les voitures. Marcher, là, entourés des voitures de course les plus prestigieuses du monde, les tribunes pleines à craquer, est un moment magique. Voir de près les machines prêtes à affronter des centaines de tours, avec des équipes sur le qui vive pour changer les pneus à la dernière minute tant le temps est incertain, nous impressionne.
Nous nous arrêtons l’espace de quelques minutes à côté de la BMW #20, vingtième Art Car engagée par laNous nous arrêtons l’espace de quelques minutes à côté de la BMW #20, vingtième Art Car engagée par la marque à l’hélice et imaginée par l’artiste américaine Julie Mehretu. Projet initié dans les années 70’s par Hervé Poulain, le principe est de confier la peinture à un artiste pour faire courir une œuvre d’art. Les quatre premières voitures ont été pilotées par Monsieur Poulain lui-même, et la tradition a perduré avec un réel engagement de la part de la marque. Autour de son œuvre, Julie Mehretu explique qu’elle a imaginé le résultat de la confrontation entre son tableau Everywhen et l’Hypercar, imaginant que les grilles de la calandre inhale la peinture. “La Art Car sera achevée qu’une fois la course terminée”, sur ces mots, nous souhaitons que la voiture passe la ligne d’arrivée !
“Oh non Zizou, pas après tout ce que tu as fait”. De retour dans les tribunes, nous assistons à la cérémonie d’ouverture de la course. Le plus célèbre des footballeurs Français donne le coup d’envoi de la course. C’est avec des frissons que nous assistons à la remise du drapeau par l’armée Française à Zinedine Zidane.
16h. Que la course commence !
La pluie s’invite rapidement après le départ, et déjà quelques accidents. Après quelques minutes de course, la BMW Art Car fait une sortie de piste, puis reprend difficilement la course. Nombreuses sont les voitures qui glissent… Le spectacle est là, mais l’on prend aussi conscience du risque que prennent les pilotes pour tenter de faire le plus de tours possible jusqu’au lendemain. Nous décidons de parcourir les environs du circuit la nuit, pour vivre les 24h du Mans d’une manière différente avec nos amis.
La course n’est pas difficile à suivre, des écrans géants sont partout. Mais rien ne vaut nos yeux, et nous décidons de prendre de la hauteur avec la tombée de la nuit, direction la grande roue. Nous admirons le circuit dans toute sa splendeur. La vue panoramique nous a permis de saisir l’ampleur de cet événement, avec les voitures filant sur la piste, les tribunes bondées de spectateurs et l’immensité du site des 24 Heures du Mans. C’est depuis la grande roue que nous apprenons l’abandon d’une des M4 GT3… Certes déçus, nous décidons tout de même de continuer notre périple dans les antres du Mans, en nous rendant au camping Beauséjour. Là, nous faisons la rencontre d’une bande d’Anglais, venus en bus Imperial et ayant installé un camp de base composé d’une guinguette et d’une scène. Nos amis se font un grand plaisir de jouer des classiques qui font bouger la tête. Purée, quelle ambiance !
La pluie bat toujours la piste, et le drapeau rouge s’agite. La course est suspendue pendant les quatre prochaines heures, nous décidons d’en profiter pour nous reposer.
Au réveil, nous apprenons l’abandon de la deuxième hypercar BMW, il ne reste plus qu’une M4 GT3 dans la course. La Art Car est en cours de réparation, et nous espérons la voir passer la ligne d’arrivée. Nous nous rendons alors au virage Daytona, première chicane de l’immense ligne droite des Hunaudières. Ici, les voitures rentrent des freinages impressionnants. Quelles vitesses de passages ! Si le record absolu du tour au Mans est détenu par Jackie Oliver, en Porsche 917 pour 3min13 et une moyenne de 250km/h, on se dit que les voitures ont tout de même énormément progressé. Le nouveau record, après l’installation des deux chicanes dans les années ‘90s date de 2015. C’est André Lotterer, au volant d’une Audi R18 Etron qui le signe en 3min17 et 248km/h de moyenne. Ce n’est pas si loin, et peut-être peut-on imaginer que le record de l’antique 917 soit battu d’ici quelques années ?
Avant de se rendre dans les tribunes pour la fin des 24 heures, nous nous rendons dans les stands BMW pour prendre la température et découvrir l’envers du décor pendant la course. Nous assistons à un travail organisé impressionnant. La course se joue sûrement autant en coulisse que derrière le volant. Chaque membre de l’équipe joue un rôle crucial dans la course vers le succès. Et s’il pourrait être facile de blâmer une équipe qui abandonne, à l’instar de BMW avec la #15, ou Alpine qui ne finira pas la course, il faut remettre les choses dans leur contexte. Faire courir une voiture de course du niveau d’une Hypercar demande de traiter un nombre de variables qui fait mal à la tête rien que d’y penser ; les 24h du Mans nous semblent désormais beaucoup plus complexes qu’il n’y paraît. Pour n’importe quelle écurie, engager une voiture sur cette course demande un tel courage que nous ne pouvons qu’être admiratifs.
L’heure du goûter approche, et celui du drapeau à L’heure du goûter approche, et celui du drapeau à damier aussi. Nous retrouvons les copains en tribunes pour assister à la fin du spectacle. Les sons des moteurs résonnent entre les bâtiments. Les V8 Cadillac font vibrer les structures, pour notre plus grand plaisir. On lit souvent que les sports mécaniques modernes deviennent ennuyeux, et il est vrai que certaines voitures ne font que trop peu passer d’émotion : pas de bruit, des designs trop modernes… Heureusement, certaines écuries adoptent des décorations dont les couleurs et les formes rappellent des voitures mythiques (notamment les Porsche), en addition avec des sons de moteurs vivants : la magie opère forcément.
Quelques minutes avant la fin du décompte, la Art Car refait surface. Les tours de retard par rapport au leader se comptent par dizaine, mais l’œuvre sera complète. Le drapeau à damier s’agite, et c’est une Ferrari 499p passe la ligne en premier, suivie d’une Toyota et d’une autre Ferrari ! Les Tifosi sont en sueurs, et après avoir passé la haie d’honneur dans la pitlane, la piste est ouverte aux nombreux supporters ! C’est impressionnant de voir les fans remonter la piste en courant, pour être aux premières loges lors de la remise des prix.
Les 24 Heures du Mans ne se résument pas seulement à la performance sur la piste, mais aussi aux rencontres, aux échanges et à l’énergie qui anime chaque participant, que ce soit dans les équipes ou dans les spectateurs. Cette édition 2024 restera gravée dans nos mémoires comme étant notre première fois au Mans. C’était fou. Il est certain que dorénavant, la 24e semaine de l’année sera dédiée pour cette course folle !
En tant qu’invités de BMW M Motorsport, nous avons eu la chance de vivre les 24 Heures du Mans d’une manière exceptionnelle. Un grand merci à eux. La M4 GT3 se classant deuxième nous a remonté le moral, et nous espérons que pour le reste de la saison au WEC BMW sera plus chanceuse (et que Ferrari regardera dans ses rétroviseurs…).