Le Barathon des Grandes Alpes
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Le Barathon des Grandes Alpes

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Quatre copains, trois jours, deux bars et un itinéraire de rêve. C’est le décompte parfait pour le cahier des charges d’un micro road-trip. Le premier pour l’équipe de Machinistic, qui compte rallier Menton depuis Thonon-les-Bains, par la route des Grandes Alpes. Trois jours ? Est-ce que nous avons fait appel à Thomas Pesquet et à l’Agence spatiale européenne pour se déplacer si rapidement ? Presque. BMW nous a fourni une fusée sol-sol, une série trois qui dépote, dans laquelle on peut ranger toutes nos affaires : la dernière M3 Touring. Prête pour affronter les plus beaux cols des Alpes françaises, chargée de fromages locaux et de matériel photo, entre le bar des copains de Classique Autowerks et celui de Benzin, nous partons pour un barathon un peu particulier.

Oh, que ça fait du bien de prendre la route. Le voyage commence réellement juste avant Annecy, où nous devons retrouver Kévin. À bord de la M3, Yannick, Frédéric et moi prenons notre première petite claque quand la route suspendue de l’A40 nous offre le premier beau panorama du voyage. « Oh ça tue » ; ce n’est que le premier. Une fois l’équipe de choc au complet, nous nous dirigeons rapidement vers notre première étape, le temps d’une soirée, chez Classique Autowerks.

Etape 0 – Classique Autowerks

À côté de Thonon les Bains, nous arrivons dans un lieu qui nous plait tout de suite énormément. Johann et Samuel ont monté un bar autour de ce qu’ils aiment et de leur activité de vente de pièces custom pour véhicules d’époque. C’est Classique Autowerks, et nous sommes accueillis comme des rois par Johann, sa copine Louanne et Uhini le Dachshund. Des craft beers, un Mont d’Or : le paradis. Le bar prend place dans une ancienne forge décorée avec goût, dans une ambiance industrielle. Au fil de la discussion, on se rend compte que la création d’un lieu de vie dans l’univers de l’automobile n’a pas été aisée. Des bâtons dans les roues de la part de l’administration, et un budget très serré qui a eu pour conséquence une débauche de bonnes idées pour rendre le spot vraiment cool. On s’y sent bien, et même si la M3 suscite quelques débats quant aux évolutions de l’automobile [on en parlera plus tard, ndlr], elle trouve sa place avec nous, au pied du bar, entre les Chesterfield et la brique des murs. Après une bonne soirée, qui comme toute bonne soirée est passée trop vite, c’est le ventre plein et le cœur serré que l’on quitte nos amis pour rejoindre les bras de Morphée, une dernière nuit dans un lit avant trois jours de bivouac…

Etape 1 – Thonon-les-Bains – Valloire  Bourg-St-Maurice

Les fenêtres de la chambre sont embuées, il est tôt et la lumière du jour filtre à travers les stores. Il est temps de se remuer ! Nous avons une mission à boucler, de nouvelles terres à explorer. Ce soir, nous devons être en Maurienne, et à bord de notre vaisseau nous avons une liste de cols à passer. Comme de bons touristes, nous faisons une halte sur la stèle du kilomètre zéro de la Route des Grandes Alpes. Si le voyage se déroule bien, nous devrions alunir sur sa sœur jumelle, à Menton, dans trois jours. L’occasion pour Yannick, encore étourdi par la soirée de la veille, de faire de la gymnastique, et surtout de s’offrir une belle vue sur le lac Léman. 

La route commence bien, nous tirons au sort qui conduira la voiture en premier… et, sans tricher, je gagne le baquet conducteur. Incroyable, nous traversons les Gorges du Pont du Diable. C’est un peu encombré, mais la puissance dont dispose la voiture, même chargée jusqu’au toit, nous permet rapidement de nous affranchir de la circulation. On se relaie au volant et chacun prend conscience de l’arme de destruction massive qu’est la M3 pendant que les autres profitent des paysages qui défilent à vitesse grand V. Les cols des Gets, de la Colombière et des Aravis sont passés avec succès, et nous ne traînons pas trop car nous avons rendez-vous.

Jessy nous attend à Beaufort, où nous devons nous ravitailler en fromage et en vin de Savoie pour le coucher de soleil. Une mission dans la mission en quelque sorte. La petite CRX de notre ami vidéaste, guide local ayant une connaissance encyclopédique des routes de la région, nous sert de lièvre. Ça bombarde fort jusqu’au barrage de Roselend. Si, jusque-là, la route était belle, nous avons soudainement changé d’univers.

C’est magnifique, l’eau du lac est turquoise, le soleil couchant nous offre la lumière ocre d’octobre. Ça tape. Évidemment, on en profite pour faire plus ample connaissance avec Jessy, et prendre des images ensemble. Après un arrêt à la Chapelle de Roselend, nous prenons l’apéro au Cormet, le soleil nous offrant encore un peu de chaleur dans son ultime descente. 

Partis avec l’idée de faire un bivouac, mais équipés comme de bons touristes (oui, encore), nous nous rendons rapidement à l’évidence : ça caille trop pour passer la nuit à cette altitude. Une nouvelle fois, c’est le cœur serré que nous quittons Jessy, avec qui nous aurions bien passé plus de temps. Une prochaine fois, avec sa S2000, pour une expérience différente ! Nous décidons de rouler vers Bourg-Saint-Maurice, où nous trouvons un coin d’herbe le long de l’Isère pour passer la nuit. Sur place, on ouvre la carte, et on prend conscience du retard que nous avons sur le planning… « Allô la terre, on va passer en post-combustion. »

« Nous trouvons un coin d’herbe le long de l’Isère pour passer la nuit. Sur place, on ouvre la carte, et on prend conscience du retard que nous avons sur le planning… « Allô la terre, on va passer en post-combustion. » »

Etape 2 – Bourg-St-Maurice – Briançon

Le soleil se lève doucement, nous traversons la Tarentaise avec les yeux en roupettes de coucou. Mais les paysages, l’excitation du voyage, les passages des tunnels pare-neige nous réveillent assez rapidement. On ne dirait pas non à un café, mais on passe le lac du Chevril, puis on arrive à Val d’Isère au moment où la lumière commence à être belle. Nous devons faire honneur au col de l’Iseran, et vous ramener de belles images. Au diable le café, notre excitant sera la route. Et c’est après avoir passé le panneau « Attention traversée de marmotte » que nous sortons d’hibernation. 

Siège au plus bas, dossier bien droit : position d’attaque comme le conseille Jean-Michel Fabre. Kévin déploie la puissance, le virage du pont Saint-Charles fait office de rampe de lancement. Virage après virage, le lourd break blanc nous surprend. On ne ressent pas son poids, alors que chargée comme elle est elle s’apparente plus à un fourgon qu’à une voiture de sport. Quel couteau suisse. Les vitesses sont inavouables, les bouts de gommes se détachent des pneus et tapent dans les passages de roues. Heureusement, la bien nommée Notre-Dame de Toute Prudence nous accueille au sommet. Ouf, nous sommes en vie.

L’excitation du col de l’Iseran est aussi due au fait qu’il ouvre la porte sur une galaxie de cols mythiques : nous enchaînons avec le Mont-Cenis, et après cette matinée sans café, nous décidons de faire un stop au bord du lac pour manger de bons diots savoyards et nous abreuver d’une bonne bière. La faim me torturant l’estomac, une fois n’est pas coutume, j’enfonce la pédale de droite, tricote les palettes, et nous gare devant le restaurant comme des princes. Il ne faut pas se laisser aller. Ce bon repas avalé, on réalise qu’il ne nous reste plus qu’une journée et demie pour rallier Menton ; ce n’est pas en se prélassant au soleil que nous atteindrons notre but. Nous redescendons en Maurienne, pour abreuver le six cylindres, et surtout pour s’amuser dans le prochain col…

Le col du Galibier nous tend les bras ! La clé de voûte du trip. Si seulement deux mille moutons ne nous bloquaient pas la route ! Notre castor rapide n’effraie pas une seconde les boules de laine qui se faufilent autour de lui. C’est amusant, la montagne nous gagne.

Une fois passé cet obstacle ambulant, Yannick prend les encouragements inscrits sur la route au pied de la lettre : « COURAGE », « ALLEZ POUPOU ». Moquette ! Les abords rocheux du tracé le poussent à piloter la bête avec précision, et à ne pas s’emmêler les pédales. Au sommet, nous passons un peu de temps avec une bande de fous furieux. Des anglais en road trip, eux aussi, mais en Citroën. De l’AX rapide et furieuse, à la C5, en passant par des DS et SM, ils parcourent une boucle de 7000 kilomètres. Fiers de nous montrer un cardan cassé plus bas dans la montage, et réparé sur le bas-côté, on se dit que ce n’est pas si mal d’avoir une voiture neuve, pour une fois. 

Nous rangeons le matos photo, et entamons une liaison dans la vallée jusqu’à Briançon, avant la tombée de la nuit. Toujours motivés à dormir sous la tente, nous établirons notre camp dans un camping, parce qu’il n’y a pas de honte à prendre une bonne douche de temps en temps. Le retard est à moitié rattrapé, et en partant tôt le lendemain matin, en essayant de rouler à la vitesse de la lumière comme le Millenium Falcon, il se pourrait que la mission soit une réussite.

Etape 3 – Briançon – Menton ? 

Briançon est humide ce matin. Comme dirait Fred, « on pack vite et on se warm up dans la voiture ». Carrément, ok. On attaque la journée avec le col d’Izoard. Le paysage au matin, avec la lumière douce du soleil levant, est superbe. Dans la montée, on passe rapidement de la forêt à la roche, la route est parfaite. Nous, les puristes adorateurs de voitures anciennes, confessons prendre du plaisir dans cette M3 toute neuve. Sûrement que le moment y est pour quelque chose, mais la voiture reste vive, confortable, rapide… plaisante ! Une fois le sommet du col passé, on a l’impression de changer de dimension : le paysage change encore, avec des gorges larges et la route qui serpente au milieu. Le soleil est déjà bien haut dans le ciel, et alors que nous roulons vers le mythique col de la Bonnette, c’est lors d’une pause café que l’on nous apprend qu’il est fermé…

Nous avons deux options. Option numéro un : passer par Barcelonette et prendre des routes roulantes. Option numéro deux : passer par le col de Vars, celui de la Madeleine, traverser la frontière italienne, revenir par le col de la Lombarde et terminer sur le col du Turini… Sachant que nous sommes attendus pour le dîner chez les copains de Benzin, et que le temps est compté si on ne veut pas faillir à notre mission, la première option est préférable. Ceci dit, étant donné qu’à quatre nous avons à peine le cerveau d’une personne adulte et raisonnable, nous empruntons l’itinéraire avec le plus de cols, pour une seule et unique raison : les virages sont notre raison de vivre. Voilà.

Sur la route de Vars, après un coucou à Tam-Tam Photo sur le bord de la route, qui a sûrement plus l’habitude de prendre en photo des cyclistes à bout de jambes qu’un break qui souffle fort, nous nous dirigeons vers le col de la Madeleine. La route est soudainement déviée, car la voirie est occupée à « purger la montagne ». Pas d’inquiétude, l’eau des rivières n’est pas remplacée par du DOT4. Mais des roches risquent de s’effondrer sur la route, et c’est à coup de dynamite que la montagne est débarrassée de ses roches menaçant la départementale. Sur l’itinéraire de secours, un panneau indique « Véhicules bas de caisse, à vos risques et périls ». Yannick s’esclaffe « C’est bon, bas de caisse c’est pour les GT3 RS, on est large » ! Nous voilà sur une piste, le pire cauchemar de ceux qui roulent dans des voitures rabaissées. Heureusement, la terre est tassée, et la présence de pierres et d’ornières se fait rare. C’est l’enfer, mais Yannick qui pense être à bord d’un Nissan Patrol roule à l’aise. Sûrement l’effet du grip spécial Dakar…

Nous passons le col de la Madeleine, et traversons un peu la campagne italienne, entre petits tunnels, villages à l’architecture typique, et surtout : le col de la Lombarde où le seul panneau à suivre est « Francia ». Derrière le volant, je bascule sur le mode de conduite M1, que l’on a surnommé « le mode débile ». DSC OFF, plus de cinq cents chevaux sur les roues arrière. Allez savoir pourquoi, mais c’est comme ça que j’ai pris le plus de plaisir à conduire cette auto. En quatre roues motrices, c’est trop sécurisant, et on n’a pas peur de la puissance. Ça passe, sans se concentrer, et ça en devient abrutissant. Dans le mode débile, on doit se concentrer, ne pas mettre trop de gaz volant braqué, sous peine de devoir téléphoner à BMW France pour annoncer que la voiture a fusionné avec un sapin. Ça fout la frousse, mais c’est tellement bon. La direction est toujours très filtrée, mais on ressent enfin la motricité dans le fond du baquet, et quelques sensations que l’on connaît en ancienne. Merci le col de la Lombarde, je commence à l’apprécier pour ses qualités dynamiques. Nous repassons en France…

Le col de Turini, bien que très réputé, a été un passage compliqué. C’est le dernier col du périple, mais il est si étroit, que notre large voiture est difficile à placer dans la circulation. Heureusement, la M3 pince fort, et nous permet de nous faufiler entre les camions surgissant de nulle part et les épingles bien serrées. Nous arrivons rapidement au sommet du col, et même si une bonne bière… nous fait de l’œil en terrasse, nous décidons de reprendre la route pour avoir le temps de tremper nos orteils dans l’eau, à Menton.

Séquence émotion quand nous arrivons sur les hauteurs de Menton. La perspective est folle, la vallée occupée par la ville est découpée par le viaduc, sur un fond de Méditerranée. Coucou la mer, ça fait plaisir de te voir. Nous avons l’impression d’un retour à la civilisation, c’est étrange. La route a été à nous pendant trois jours, et soudain, nous devons la partager avec des PNJ qui semblent si pressés. Comme à Thonon, nous faisons le stop symbolique, mais non moins important, sur la plaque du kilomètre zéro. C’est fait. On l’a fait. La Route des Grandes Alpes en trois jours, à quatre. Une dernière photo pour la postérité, un petit pas pour l’homme, un grand pas pour l’Humanité…

Etape finale : Benzin Le Stand

Il y a quelques étapes de cela, quand nous avions encore toute notre tête, ce micro road-trip n’était-il pas présenté comme une sorte de barathon ? Bienvenue au Stand Benzin, un café récemment ouvert par Anthony et David, pour rassembler les passionné.e.s de la région niçoise. Planchettes de fromages, saucissons, bières, c’est le réconfort qu’il nous fallait ! À l’intérieur de ce chouette lieu de recueillement, la sainte Dodge Viper et la Lancia Fulvia adorée d’Anthony attirent notre attention. Nous discutons autour des autos, puis nous partons manger la pizza dont nous rêvons depuis le départ. C’est beau le Sud.  

Pour ce premier micro road-trip, nous sommes ravis d’avoir traversé les Alpes Françaises à bord de cette M3 Touring mise à disposition par BMW France. C’est une sacrée machine, et même si elle peut soulever des débats, par son design, par la manière dont elle livre ses performances, même si elle a été déroutante pour des habitués d’anciennes comme nous, elle a été un partenaire de route fantastique. Aucun mal de dos à déplorer [et pourtant on a tous la trentaine, ndlr], un niveau de performance effrayant, et de la place ! Concernant la route, c’était FANTASTIQUE. On vous partagera l’itinéraire précis en lien, plus bas, et nous ne pouvons que vous inviter à réaliser cet itinéraire qui régalera l’amateur de conduite comme celui de beaux panoramas. En trois jours, notre seul et unique regret est de ne pas avoir pris le temps de nous arrêter à certains endroits, comme des cascades ou des points de vue nécessitant quelques dizaines de minutes de marche. Mais c’est vraiment chipoter, parce que c’était fou. Nous avons déjà hâte de repartir, reste à choisir une destination… 

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